jeudi 23 février 2017

En Libye, les ambiguïtés idéologiques du maréchal Haftar L’homme fort de l’Est libyen donne des gages aux salafistes comme le prouve le récent décret interdisant aux femmes de moins de 60 ans de voyager seules en avion.


En Libye, les ambiguïtés idéologiques du maréchal Haftar

L’homme fort de l’Est libyen donne des gages aux salafistes comme le prouve le récent décret interdisant aux femmes de moins de 60 ans de voyager seules en avion.

LE MONDE | 21.02.2017 à 11h07 • Mis à jour le 21.02.2017 à 11h33 |Par Frédéric Bobin (Tunis, correspondant)
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Le maréchal Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est libyen, aime à se présenter comme un nationaliste hostile à l’islam politique. A l’étranger, nombre de ses soutiens – l’Egypte et la Russie notamment – l’appuient précisément parce qu’il prétend incarner en Libye l’hostilité à l’islamisme dans ses différentes versions : des Frères musulmans aux djihadistes. Or, la décision que vient de prendre un de ses proches révèle les ambiguïtés profondes de ce camp « anti-islamiste ». Le général Abdul Razzaq Al-Nadhouri, commandant militaire de la zone s’étirant de Ben Jawad à Derna en Cyrénaïque (Est), a décrété dimanche 19 février que les femmes âgées de moins de 60 ans seraient désormais interdites de voyager en avion sans être accompagnées par un homme de leur famille. Entre autres raisons, il a évoqué le risque qu’elles entrent en contact avec des services de renseignement étrangers.

Lire aussi : Khalifa Haftar, faux paria diplomatique
Stratégie pour l’instant payante

Nombre d’analystes établissent un lien entre ce type de décision ultra-conservatrice et l’influence grandissante exercée en Libye, à l’Ouest (Tripolitaine) comme à l’Est (Cyrénaïque), par les salafistes de l’école madkhaliste, la branche la plus sectaire du salafisme dit « quiétiste » (apolitique). Ils doivent leur nom à leur maître, le théologien saoudien Rabia ben Hadi al-Madkhali, qui prêche, outre l’application rigoureuse de la charia, la loyauté aux régimes en place. Ils sont très hostiles aux Frères musulmans mais aussi aux djihadistes de type Al-Qaida ou Etat islamique (EI).

En Cyrénaïque, ces salafistes madkhalistes sont engagés aux côtés du maréchal Haftar dans sa lutte contre les combattants du Conseil de la choura, une mouvance « révolutionnaire » incluant notamment des noyaux de l’EI. En Tripolitaine, ils ont également prêté leur concours à l’offensive contre l’EI à Syrte menée à partir de Misrata. Qu’importe si les forces de Misrata et celles de Haftar sont elles-mêmes rivales et se combattent. Les salafistes madkhalistes soutiennent chaque camp en prenant bien soin de ne pas s’affronter entre eux. La stratégie s’est révélée pour l’instant payante, comme le prouve le récent décret interdisant aux femmes de voyager seules en avion en Cyrénaïque.







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Frédéric Bobin (Tunis, correspondant)
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