jeudi 17 août 2017

« Le terrorisme au Sahel, conséquence de la prévarication érigée en mode de gouvernance »

« Le terrorisme au Sahel, conséquence de la prévarication érigée en mode de gouvernance »

CHRONIQUE
LAURENT BIGOT
chroniqueur Le Monde Afrique
Notre chroniqueur souligne la prédation des élites ouest-africaines et l’aveuglement – voire l’approbation – de la communauté internationale.
Temps de lecture : 11 min
Les présidents tchadien, malien, nigérien, mauritanien, français et burkinabé, lors du sommet du G5 Sahel, à Bamako, le 2 juillet 2017. CHRISTOPHE ARCHAMBAULT/AFP
Lorsque les médias parlent du Sahel, c’est pour évoquer la menace terroriste sous toutes ses formes – une menace bien réelle, comme l’ont récemment montré l’attentat à Ouagadougou, le 13 août, ou les attaques contre les Nations unies au Mali, le lendemain. C’est également le cas pour les autorités françaises, qui communiquent abondamment sur le sujet afin de vanter et de justifier le déploiement de l’opération militaire « Barkhane » dans la bande sahélo-saharienne (BSS en langage militaire). Or le sujet central du Sahel n’est pas celui-là.
Le terrorisme, ou plutôt la montée en puissance des groupes armés dans le Sahel, est la conséquence d’une grave crise de gouvernance qui touche toute l’Afrique de l’Ouest. Cette crise de gouvernance se caractérise par une disparition de l’Etat au service des populations, car l’Etat moderne est privatisé par les élites politiques à leur profit. Cette privatisation – Jean-François Bayart parle de patrimonialisation – s’est accélérée ces dernières années pour atteindre un niveau tel que, désormais dans les pays sahéliens, les populations sont livrées à elles-mêmes, plus aucune entité (Etat ou autre) n’étant chargée d’une forme d’intérêt général.
C’est particulièrement le cas au Mali, au Niger et en Mauritanie. Ces Etats ont tous en commun un système politique miné, accaparé par une élite prédatrice dont les méthodes ont non seulement porté l’estocade à ce qu’il restait de l’Etat et de son administration, mais en plus ont fait entrer au cœur même du pouvoir le crime organisé. La conquête du pouvoir et sa conservation ne sont perçues que comme un accès à une manne intarissable.

Les dégâts des ajustements structurels

Les Etats sahéliens ont été fragilisés, dans les années 1980, par les ajustements structurels imposés par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale au nom du libéralisme doctrinaire ambiant. Il fallait « dégraisser » la fonction publique, dont les secteurs les plus « gras » étaient l’éducation et la santé. Quelle politique « visionnaire » pour une zone qui allait subir quinze ans plus tard un choc démographique sans précédent dans l’histoire de l’humanité !
Le Niger est aujourd’hui le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé au monde, soit plus de sept enfants par femme. Le Mali n’est pas loin derrière, avec un peu moins de sept. Ce n’est plus une bombe à retardement, c’est une bombe qui a déjà explosé et dont les dégâts sont en cours d’estimation. Serge Michailof rappelle dans son remarquable livre Africanistan que le secteur manufacturier au Niger crée 5 000 emplois par an quand le marché de l’emploi doit absorber chaque année 200 000 jeunes…
Le secteur de l’éducation est sinistré. Les classes du primaire dans les quartiers populaires de Niamey ont des effectifs habituels proches de la centaine d’élèves, avec des enseignants si peu formés qu’une part importante ne maîtrise pas la langue d’enseignement qu’est le français. Au Sénégal, pourtant un pays qui se maintient mieux que les autres, le système éducatif est dans un tel état que le français, langue d’enseignement, recule au profit du wolof. Si la promotion des langues dites nationales est incontestablement un enjeu, aujourd’hui leur progression est d’abord le signe de la faillite du système d’enseignement.
Que dire des systèmes de santé ? Le niveau des soins est accablant. L’hôpital de Niamey est un mouroir. L’accès aux soins est un parcours du combattant semé d’étapes successives de corruption. Les cliniques privées fleurissent dans les capitales ouest-africaines pour une clientèle privilégiée, mais le peuple doit se contenter de soins qui relèvent plus des soins palliatifs que curatifs. Il faut dire que les élites politiques n’en ont cure, elles se font soigner à l’étranger et scolarisent leurs enfants dans les lycées français (hors de prix pour le citoyen lambda, une année de scolarité pouvant représenter plusieurs années de salaire minimum) ou à l’étranger.

Des élections grossièrement truquées

Précisons à leur décharge qu’étant donné les dégâts causés par les ajustements structurels et la démographie actuelle, aucun Etat ouest-africain ne peut désormais relever sur ses seules ressources propres les défis de l’éducation et de la santé. Le rapport sénatorial sur la politique française d’aide au développement au Sahel (« Sahel : repenser notre aide au développement », juin 2016) rappelle un chiffre vertigineux : de 2005 à 2035, le Mali devra multiplier par 11 ses dépenses en la matière. La solidarité internationale pourrait en effet contribuer à financer ce type de dépenses, mais on butte sur le problème structurel qu’est la patrimonialisation ou la privatisation de l’Etat.
Aujourd’hui, les budgets de l’Etat sont exécutés en dépit du bon sens avec l’aval du FMI et de la Banque mondiale, qui froncent parfois les sourcils quand les ficelles de la prévarication deviennent trop grosses (on pense à la fâcherie de six mois des institutions de Bretton Woods, en 2014, après les surfacturations massives des marchés de défense au Mali, l’aide ayant repris sans qu’aucune procédure judiciaire n’ait été ouverte ni les méthodes changées…). Quand on sait que plus de 50 % du budget d’investissement de ces Etats proviennent de l’aide publique internationale, on peut légitimement s’interroger sur la désinvolture avec laquelle la communauté internationale gère l’argent du contribuable.
Cependant, l’irresponsabilité du système international de développement (Nations unies et coopérations bilatérales) est tel que cet argent est déversé sans aucun souci de rendre des comptes. Le critère de performance utilisé par l’Union européenne en la matière est le taux de décaissement. L’objectif est de dépenser les budgets. Savoir si cela est efficace et conforme à l’objectif fixé importe peu. Pour les autorités bénéficiaires, cette absence de responsabilité a développé un réflexe d’assistanat, le premier geste étant de tendre la main avant d’envisager quelque action que ce soit. Ensuite, c’est de se répartir la manne de l’aide, et ce d’autant plus facilement que les contrôles sur la destination finale et l’efficacité sont des plus légers.
Les élites politiques ont depuis une vingtaine d’années fait de la prévarication le mode de gouvernance le plus répandu. La démocratisation qui a suivi la vague des conférences nationales au début des années 1990 n’a rien empêché. Nombre d’élections qui se sont tenues depuis n’ont guère été sincères, parfois grossièrement truquées (deux cas d’école parmi tant d’autres : l’élection d’Alpha Condé en 2010 en Guinée, élu au second tour alors qu’il n’a fait que 17 % au premier tour et son adversaire 40 %, et celle de Faure Gnassingbé en 2015 au Togo, durant laquelle le dépouillement était environ à 40 % quand les résultats ont été proclamés…).
Tout cela avec l’approbation de la communauté internationale et les chaleureuses félicitations des différents chefs d’Etat français. La lettre de François Hollande adressée au président nigérien Issoufou en 2016 est un modèle du genre. Féliciter un président élu au second tour avec plus de 92 % des voix alors que son opposant principal a fait campagne depuis sa prison, c’est osé. Le monde occidental se targue d’être le défenseur de la cause des peuples en promouvant la démocratie, mais les peuples africains n’ont vu qu’une chose : ce monde occidental soutient les satrapes africains sans aucune considération pour les populations qui en subissent les dramatiques conséquences.

La politique financée par le narcotrafic

Cette situation dans le Sahel est un terreau propice au développement d’idéologies radicales et la lutte armée devient un horizon séduisant pour une partie de la jeunesse qui sait que, hors de l’émigration vers l’Europe ou de l’affiliation aux groupes armés, point de salut. L’affaissement de l’Etat dans les pays sahéliens s’est accéléré avec la montée en puissance des divers trafics en zone sahélo-saharienne et notamment avec le trafic de cocaïne en transit vers l’Europe.
La vie politique de ces Etats s’est financée auprès de narcotrafiquants notoires qui n’ont pas hésité à prendre la place du généreux guide libyen Kadhafi. C’est ainsi qu’un conseiller du président malien Amadou Toumani Touré (2002-2012) était un trafiquant notoire, aujourd’hui reconverti au Burkina Faso. C’est aussi l’affaire emblématique du Boeing chargé de cocaïne qui se pose en 2009 dans le désert malien et dont le déchargement a été supervisé par un officier supérieur de l’armée malienne, aujourd’hui général. L’un des principaux soutiens financiers du parti du président nigérien Issoufou était Chérif Ould Abidine (décédé en 2016), dont le surnom était « Chérif Cocaïne »…
La frontière entre l’Etat et le crime organisé s’est estompée progressivement, laissant les populations livrées à leur sort. L’islam radical s’est répandu comme un modèle alternatif à la démocratie, laquelle est perçue par une part grandissante de la population comme une escroquerie idéologique visant à maintenir en place des kleptocraties. Le réarmement moral passe désormais par l’islam dans sa version la plus rigoriste (et étrangère aux pratiques confrériques du Sahel), soutenu par une classe politique qui a utilisé la religion pour faire du clientélisme.
Les groupes armés dits djihadistes tels qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ou Ansar Dine, qui eux-mêmes recourent volontiers aux réseaux et aux pratiques mafieux, évoluent désormais dans un environnement de moins en moins hostile. Quand j’entends parler de terrorisme djihadiste au Sahel, je pense souvent à un magicien qui, pour réaliser son tour, attire l’attention du public avec la main droite et réalise son tour avec la main gauche. Le terrorisme, c’est la main droite. La réalité du tour, la main gauche, c’est la grave crise de gouvernance dont personne n’ose parler.
Les Etats sahéliens ont parfaitement compris tout le bénéfice qu’ils pouvaient tirer de notre peur du terrorisme djihadiste : Jean-François Bayart parle de « rente diplomatique de la lutte contre le terrorisme ».Moyennant un discours engagé contre le terrorisme et l’autorisation pour l’armée française d’opérer sur leur territoire, ces dirigeants ont compris qu’ils ne seraient pas du tout inquiétés pour les graves dérives de gouvernance. La communauté internationale reproduit la même erreur qu’en Afghanistan lorsqu’elle avait soutenu le régime indécemment corrompu de Hamid Karzaï, ce qui n’avait fait que renforcer les Talibans et accélérer le rejet par la population des forces étrangères.

Rôle trouble des services algériens

A cette cécité sur les causes profondes, ajoutons celle relative au rôle joué par les services de sécurité algériens. Comment le mouvement d’Iyad Ag Ghali a-t-il été financé ? Où se replient Iyad et ses combattants ? Comment se fait-il que Mokhtar Belmokhtar sillonne en toute impunité la zone depuis vingt ans ? Des questions qui trouvent des réponses dans la complicité d’une partie des services de sécurité algériens.
Je me souviens d’un entretien à Bamako en 2009 avec Ahmada Ag Bibi, député touareg, à l’époque bras droit d’Iyad Ag Ghali et resté depuis lors proche du chef d’Ansar Dine. Il me disait que lorsque AQMI s’est installé en 2006-2007 dans l’Adrar des Ifoghas (Nord-Mali), Iyag Ag Ghali et ses hommes l’ont combattu. Le soutien logistique algérien dont bénéficiait Iyad Ag Ghali depuis des années s’est immédiatement interrompu. Il en a déduit que s’attaquer à AQMI, c’était s’attaquer à une partie des services de sécurité algériens. Il a donc composé.
Ahmada Ag Bibi a conclu cet entretien en me disant que l’Algérie poursuivait au Sahel sa guerre de décolonisation contre la France. Il a ajouté qu’il ne comprenait pas comment la France n’avait pas saisi que l’Algérie la considérait toujours comme un ennemi. Au cours de ma vie de diplomate, j’ai pu constater, en effet, l’angélisme dont fait preuve la France à cet égard. C’est troublant.
On pourrait aussi parler des autorités des pays sahéliens qui négocient des pactes de non-agression avec ces groupes armés. C’est le cas de la Mauritanie, comme l’attestent des documents saisis par les Américains lors du raid mené contre Oussama Ben Laden en 2011 au Pakistan.
Bref, résumer la situation sécuritaire du Sahel à sa seule dimension « terroriste » est un raccourci dangereux car il nous fait tout simplement quitter la réalité du terrain.

Le destin du Sahel ne nous appartient pas

Il ne peut y avoir d’ébauche de solutions sans un constat de vérité. Si ceux qui prétendent contribuer à la solution se racontent des histoires dès l’étape du constat, comment l’élaboration de réponses aux défis du Sahel pourrait-elle être un processus pertinent ? La communauté internationale tombe dans le même aveuglement qu’elle a savamment entretenu pendant cinquante ans sur la question de l’aide au développement.
Refusant de regarder une réalité qui dérange, on s’obstine dans des réponses qui n’ont aucun impact durable sur les réalités. Aujourd’hui, nous pensons l’Afrique depuis des bureaux et des salons de ministères ou de grandes organisations internationales dont la déconnexion avec la réalité est effrayante. Plus grave encore, notre réflexion repose sur des postulats inconscients qui pourraient expliquer notre manque d’humilité.
Et si la solution était que nous cessions de vouloir tout gouverner ? Quel est ce postulat intellectuel qui consiste à considérer comme admis que nous avons la solution aux problèmes du Sahel ? Pour ma part, je pense que la solution est entre les mains des peuples concernés. Il est temps de mettre les dirigeants de ces pays face à leurs responsabilités et qu’à leur obsession d’accroître leur patrimoine personnel se substitue enfin celle de s’occuper de leur propre pays.
J’entends souvent dire que nous ne pouvons pas ne rien faire. Ah bon ? Pouvez-vous le démontrer ? Accepter que la solution puisse se mettre en place sans nous, est-ce à ce point inacceptable pour notre cerveau d’Occidental ? Des milliers d’heures de réunions dans les ministères et organisations internationales pour parler du Sahel, avec, 99 % du temps, aucun représentant de ces pays et, 100 % du temps, sans aucun point de vue des populations concernées, est-ce la bonne méthode ? Ne pourrions-nous pas accepter l’idée que nous ne savons pas ? Ne pourrions-nous pas accepter que le destin du Sahel ne nous appartient pas ?
Ou alors, si nous estimons en être coresponsables, accordons aux pays du Sahel la même coresponsabilité sur la gestion de notre propre pays. La relation serait ainsi équilibrée. Mais sommes-nous prêts à recevoir des conseils venus du Sahel ? Les trouverions-nous pertinents ? Pas plus que les populations sahéliennes lorsqu’elles nous entendent disserter sur leur sort…
Laurent Bigot est un ancien diplomate français devenu consultant indépendant. Ce texte est d’abord paru dans la revue l’Archicube n° 22 de juin 2017

mardi 25 juillet 2017

http://edition.cnn.com/2017/07/21/africa/niger-agadez-smuggling-us-drone-base/index.html?sr=fbCNN072117niger-agadez-smuggling-us-drone-base0131PMStoryGal

CNN EXCLUSIVE: Agadez, crossroads of despair13:25

This city is a tinderbox, and the US is building a drone base next door

Updated 1227 GMT (2027 HKT) July 21, 2017
Just minutes from the city, faint tire tracks blow away in the wind, and the vast expanse of sand quickly becomes disorienting.
The sprawling desert north of Agadez, in the west African nation of Niger, is the size of France -- and the search is on for a single stranded truck.
We're lucky; our military convoy is armed and equipped with GPS, along with rough coordinates of which way to head. But as night falls and we begin to burn through our petrol reserves revving through the deep sand, uncertainty spreads.
Somewhere out there is a group of terrified migrants, lost in the desert for days, fearing that their hopes for a better future far away from here will end amid the dark and shifting sands that surround them.
Best (CNN is withholding her last name for her protection) knows only too well what the migrants we are looking for are going through. She was one of the few to make it out of a similar truck alive, surviving for 24 days in the desert.
Around her, the other passengers died, one by one, as they waited weeks for rescuers to arrive.
    "The first day, two guys died because of the hot sun. The third day was when people were giving up," says Best.
    The group had only one jerry can of water between them, and had to ration supplies
    "We were economizing ourselves," she explains. "We put a little water, just to taste it on the tongue, not to get dried up," she says.
    Of the 27 people who boarded the truck, just three survived.

    Promises of a better life

    Best had been lured away from her home in Nigeria by the promise of a better life in Germany. The smugglers told her they had found her a job as a hairdresser; she just had to cross the desert into Libya, where she could get on a boat to Europe.
    "They said it was just a one week journey. I spent more than one month and I didn't get to Libya," she says.
    When she arrived in Niger, she began to understand the scale of the smugglers' deceit.
    "I was crying on the phone, she never told me that I was going there to prostitute," she says. When Best resisted, she says the trafficker threatened her and stopped her from using the phone.
    "I just thank God that I did not get to Libya, because if I got to Libya I don't know how my life would have been," says Best.
      Libya is now a "black hole," says Guiseppe Loprete, the Niger Chief of Mission for the International Organization for Migration (IOM).
      The country's lawlessness, once an advantage to migrants, has become a threat as increasingly sophisticated criminal organizations and armed groups profit from the smuggling trade.
      Best is now at an IOM transit center in Agadez, waiting to return to the uncertain life she left behind in Nigeria. She's one of the lucky ones.
      No one knows just how many migrants are perishing in the desert, but Col. Aboubacar Oumarou, commander of Niger's Armed Forces in Agadez, says rescues by his men are becoming more and more routine.
      According to the IOM, 600 lives have been saved since April in newly-launched joint operations between it and the military.
      "The more pressure we put around the migrant routes used by smugglers, the more they divert from the usual roads and more to ones that are riskier with a lot of risk of breakdowns, accidents, and getting lost in the desert," says Oumarou.

      Hub for smugglers

      For centuries, the ancient city of Agadez -- a World Heritage site whose historic buildings are constructed from red earth -- has profited from its role as a transit hub at the southern edge of the Sahara Desert.
        But far from being an idyllic oasis, its endless dusty alleyways are lined by high mud brick walls, each compound closed off by corrugated iron gates.
        In recent years, Agadez's main cargo has been human: hundreds of thousands of migrants from West Africa, loaded into the back of pickup trucks for the arduous journey on towards Libya -- and Europe.
        But late last year, the government of Niger began cracking down on the trade, giving in to pressure from the European Union, in exchange for a hefty package of aid money.
        The EU's aim was clear: to stem the flow of migrants before it could reach Europe's shores.
        With few other ways to get by, the clampdown has left smugglers like Abalde Aboubakar desperate to make ends meet.
        Aboubakar apologizes for the swarm of flies, brushing off a rug and offering up a place to sit in his cramped lean-to, as goats graze among the discarded plastic bags and trash on the public dumping ground next door.
        He says he's no criminal, just a businessman -- a travel agent of sorts -- providing a service to the five young men who temporarily call this place home.
        "All the people that come here, they want to go to Italy," he says.
          The migrants entrust their hopes and dreams -- and their families' life savings -- to him, and for a fee, he arranges their travel onward.
          But his once thriving business is now struggling. "Today we have no food, because we have no money," he says.
          Aboubakar says that with few other alternatives open to them, he and other smugglers have taken their business underground -- and they are angry at the added costs of hiding their trade.

          'Tinderbox' city on edge

          Agadez is becoming a tinderbox, packed with migrants willing to risk everything, those who have spent all they had and failed to make it to Europe, and an unemployed local population, that is rapidly running out of patience.
          "Our fear is that these people who don't have work, who are vulnerable, that they can be recruited by the terrorists, by the Islamists," says Adam Moussa, a local journalist and Agadez native. "With the fall (of ISIS) in Iraq and Syria, where are these people going to go?"
          "It's all around us," says Zara Ibrahim, a women's leader and a mother. "What's happening in Mali, what's happening in Libya, next to us in Nigeria." She worries that, without jobs, Agadez's young people will look outward.
          The potential for trouble is there, says the US Ambassador to Niger, Eunice Reddick: "Young people can fall into the hands of ... jihadist violent extremist organizations, because they don't have other alternatives to earn a living."
          Niger sits in the middle of what the US military refers to as a ring of insecurity.
          "This is a nexus area, kind of a focus area, for multiple threats to the US. Libya to the north, AQIM to the west or Boko Haram to the south," says US Air Force Col. John Meiter, US commander of Air Base 101 in Niger's capital, Niamey.

          US drone base plans

          Now the US military is moving its drone operation from Niger's capital, Niamey, to Agadez. From 2018, at the behest of Niger's government, US Africa Command (AFRICOM) will launch its MQ9 Reapers -- "hunter/killer" drones with advanced intelligence gathering capabilities -- from Air Base 201, just outside the city.
          "The move to Agadez is significant because it's going to increase capability to surveil a larger and more significant area," says Meiter. "It puts us in a more strategic location."
          For now, the new base is very much a work in progress. Massive construction equipment does battle with the desert landscape 24 hours a day, every day, building a runway capable of handling military aircraft. A few hundred support staff oversee the construction work from tents nearby.
          The $100 million project is a massive undertaking -- the RED HORSE Engineering Squadron, in charge of the heavy lifting at Agadez, says it is the largest US Air Force-led construction project of all time.
          And while the instability around Niger will be the focus of operations, it will be the security situation in Agadez that ultimately determines the success of Air Base 201.
          "The stability is absolutely fragile," explains Col. Mark Cheadle of AFRICOM. "With the youth bulge that we have here -- the median age being less than 15 for more than half of the population -- literacy estimated to be at 15% and humanitarian conditions very poor, it is going to affect how we conduct business."
          A US Army civil affairs team is already trying to reach out to the local population. At one school, two officers teach dental hygiene to a local women's group. It is a small gesture -- an excuse to engage with the people here.
          "(The) closer we build a relationship with a local community wherever we are, it helps maintain our safety, it helps to maintain our security," says Captain Kyle Staron. "It's always helpful to have friends in case we have to rely on those partnerships in the future."

          Migrants stranded in desert

          Back in the dark nothingness of the desert, ten hours after we left Agadez, the convoy continues to struggle, tires sinking into the soft sand.
          Out here, with no sense of what lies before us in any direction, it's clear why Niger's government values the US aerial presence so highly.
          It's also all too apparent just how terrifying the journey must be for migrants.
          In the distance, up ahead, lights flicker. The group from the lost truck -- about 30 people in all, most from Nigeria, and around half of them women, wearing the local Islamic headdress to help them blend in -- are huddled around an abandoned well.
          Stranded out here for three days, abandoned by their smuggler after his truck broke down, they say they had no idea how dangerous these desert tracks could be.
          They were sold a dream on Facebook, they explain. Like Best before them, they've fallen for a scam which aims to get them to Europe and force them into prostitution.
          The migrants plead with the soldiers to take them onwards to Libya and not back where they came from.
          "What is out there for us that is better? To harness our talent?" asks one young man who requested not to be named. "If we have the chance to get out of Nigeria, in any part of Europe we know that our star is going to shine brighter than in Nigeria."
          Agadez remains a transit point for people's hopes, dreams and, increasingly, of their despair